samedi 29 novembre 2008

L'automne bat son plein



Et pendant que cette grand-mère balaie les feuilles qui sont tombées dans la cour de son hutong, je commence à me poser la même question que mon tongxué (collègue) de l'INALCO, Adrien qui vit à Taïwan, "maintenant que je suis ici, je vais y faire quoi ?", juste l'étape après celle du "c'est génial, j'ai tout à découvrir", comme Adrien le fait si justement remarquer. Le site d'Adrien, pour ceux que ça intéresserait c'est : http://taiwan-101.blogspot.com/



Et voilà une voisine ou une parente qui vient l'aider !
Chez moi les appareils domestiques se détraquent : deux radiateurs du chauffage central out sur cinq, l'évier fêlé de la cuisine -qui avait enfin été remplacé au bout d'un mois et demi- se retrouve avec un tuyau et un robinet qui fuient. C'est au point que je pense effectuer des bricolages moi-même car c'est toujours le cauchemar de devoir faire appel à l'agence.
Certains profs me racontent leurs déconvenues du même tabac dans leurs appartements (précédents), apparemment c'est monnaie courante les dysfonctionnements du chauffage et de la plomberie, en bref je suis dans la bonne moyenne. Tout va bien, je suis rassurée. Quand je vais faire la vaisselle dans la salle de bains où le lavabo n'est pas bien fixé, je me dis qu'au moins je n'ai pas à aller tirer l'eau au puits!
C'est presque le cas dans certains hutongs, il y a des maisons où les habitants doivent aller au point d'eau en extérieur, imaginez l'hiver quand on doit se laver la tête. Et quand on voit la minceur et la fragilité des murs et des cloisons, les fenêtres réparées avec du carton ou autre matériau de fortune, on se dit que ce doit-être bien dur d'habiter dans ces hutongs là.
Par contre, lorsqu'ils sont retapés, ce peut être magnifique. Autour du lac Houhai c'est le cas, je vous montrerai un de ces jours.
Je remarque, dans des hutongs justement, de plus en plus de cumulus fonctionnant au solaire. comme celui qui suit.



Qu'on ne vienne pas me dire que les chinois ne se préoccupent pas de l'environnement. Il en est qui le font, c'est clair.
Mais les urgences sont ailleurs, si vous en avez le temps et l'envie, allez faire un tour sur "rue 89" pour avoir des idées sur les problèmes locaux, par exemple.
Moi, pendant ce temps, je vais m'entraîner pour le spectacle de notre atelier où je travaille sur une scène de Cléopatre... en Italien.



PS : Au bahut on nous a remis une "feuille d'intention" pour savoir si on remettrait bien ça (rester au Lycée Français)ou pas pour l'an prochain. Je suppose que personne ne doute de la réponse que j'ai fourni, n'est-ce pas Manu ?
Mieux vaut ne pas confondre le yin et le vin :le yin, tu en as ou pas ou plus ou moins et c'est gratuit, le vin tu peux en avoir mais c'est pas toujours du bon vin et c'est cher... quoique... une collègue m'a fait découvrir des petits vins chinois à des prix abordables et pas désagréables au goût alors....Si tu vois où je veux en venir, Virginie !

lundi 17 novembre 2008

Shakespeare en Chine



Vous allez dire : c'est la série littéraire. Pierre Loti, Shakespeare et je redécouvre même, via des lectures que le CDI peut m'offrir, Pennac dont j'aime vraiment le style.
Pourquoi donc Shakespeare ? Mais parce que je suis un atelier de théâtre shakespearien. Et vous savez quoi ? C'est le seul endroit où on communique bien avec des chinois. D'abord parce qu'ils parlent bien l'anglais, ensuite parce qu'on est réunis là pour jouer et que ça nous plait à tous ! Dailleurs, regardez-les : ils sont ravis !



Au dessus vous avez Anne Grace qui donne des instructions à un groupe. (On était dans un café, pas notre lieu habituel, c'était un peu restreint comme espace)

Eux, les chinois, ils jouent des scènes en chinois. Pierre, un de mes collègues du lycée, joue un texte en français et moi, puisque c'est comme ça, je joue un tout petit passage de Cléopâtre en italien, tous les autres en anglais. Notre prof, Anne Grace, aime le mélange des langues. Là où elle fait un peu fort c'est qu'elle nous fait préparer un petit spectacle pour... la mi-décembre. Mais, bon, on verra bien.
Aujourd'hui je vais faire plus de place aux photos et moins au texte, je vais vous présenter les shakespeariens de Beijing.



Regardez l'air ravi de Pierre -au dessous- qui a un monologue : Claudius dans Hamlet.



Janick, elle, celle qui est en dessous, aura un sonnet et un monologue qu'elle travaille avec ardeur.



Mais, pour finir, une autre photos, un autre univers : un graphiti sur de la poussière de sable collée à un muret à la sortie B de la station de métro Shuang jing.

dimanche 9 novembre 2008

J'ai découvert la lune... et Pierre Loti


Mais oui, Pierre Loti, un écrivain dont "Le pêcheur d'Islande" ne m'avait jamais tentée. Hé bien figurez-vous que "Les derniers jours de Pékin" (1899-1900) sont fort intéressants, à condition de prendre ce livre comme un témoignage historique, le témoignage de quelqu'un qui était arrivé à Pékin après que l'Impératrice se soit fait les malles et que le saccage de la ville ait été bien entamé, y compris dans la Cité Interdite désertée par ses habituels occupants et où Loti a habité quelques jours dans l'un des palais de la susdite Impératrice. Loti... quelqu'un avec qui on ne partage pas forcément tous les points de vue (et puis il y a cet écart d'un siècle !).
Comme moi (et sans doute bien d'autres) il découvre l'immensité des lieux. Dans ce passage il va du temple de Yong He Gong (à un quart d'heure de chez moi) à la Cité interdite où il loge (4lieues):
"A travers les solitudes de Pékin, j'ignore le chemin à suivre pour sortir de ces lieux morts où nous venons de passer la journée et où jamais je n'étais venu. J'ai pour guide un mafu(...)je chemine un moment encore au milieu du silence des vieilles rues sans habitants pour arriver bientôt dans des avenues larges, qui paraissent sans fin (... passage un brin raciste) Ce retour me paraît interminable, dans le froid du soir"
C'est en lisant ces "notes envoyées de la Chine" au Figaro que, moi, je réalise que cette démesure que je croyais calquée sur les USA fait partie intégrante de cette civilisation !
Du temps de Loti (et même avant donc) c'était déjà contrasté : maisons basses de la ville mongole, Cité Interdite grandiose. Cette dualité qui frappe tous les touristes ou voyageurs de passage, tous ceux qui découvrent la ville, elle datait de l'époque de la création de la ville et, surtout, de celle de la Cité interdite.
Aujourd'hui la démesure touche bien d'autres endroits, elle concerne surtout les monuments publics (Stade Olympique, CCTV, Ministères, gares...)puis gagne des lieux résidentiels et commerciaux chics de la ville (grands hotels, centres commerciaux...). En bref tout ce qui se doit d'être prestigieux et qui s'auréole de marbre, de métal et de verre.
Bref j'ai découvert la lune ! Quant à Pierre Loti c'est intéressant un moment, histoire de corriger ses erreurs d'appréciation ou d'interprétation, mais on s'en lasse. Je l'ai quitté après qu'avec son camarade avec lequel il partageait le palais, ils y aient fumé quelques pipes d'opium et découvert toute la magnificence des lieux et des objets qui les entouraient. Le retour à Tian jin en jonque tirée par les coolies chinois ne me tentait guère.
Je suis passée à quelqu'un de plus contemporain et plus vivante (à la décharge de Loti, son voyage se déroulait dans des circonstances tragiques, macabres) Zhang Jie.
Malgré son titre : "Ailes de plomb", le roman est très enlevé, d'un style ironique pour décrire les travers moaïstes de ses contemporains. Un peu dans la veine du Kundera de "Risibles amours".
Et moi, que deviens-je, me direz-vous ?
J'ai expérimenté la pédicurie à la chinoise avec massage des pieds : un régal !
Le massage tout court : c'est fou ce que la maturité apporte comme courbatures et ce que le stress de la vie urbaine apporte comme tensions ! J'ai dégusté ! Et j'ai appris à cette occasion que, dans la classification chinoise, mes tensions et courbatures sont la marque d'un excès de yin.
Impressionnant le masseur : un vieux monsieur mal voyant qui, je le sentais, captait tous mes désagréments. Et heureusement car, pour m'exprimer, je possède un vocabulaire assez limité, en particulier en ce qui concerne les parties du corps "mollet", "talon", des mots genre "crampe" et autres joyeusetés...
Ah le chinois !
Il y a un vent de panique au lycée parmi les gens que je fréquente. Tous-toutes se préoccupent de chercher un ou une prof de chinois pour pouvoir communiquer un peu avec les autochtones (tout en sachant qu'un au-delà du "bonjour-bonsoir", "passez-moi la carte SVP" et "ce n'est pas ce que j'avais commandé" relève du miracle). Tous sauf l'une de mes collègues documentalistes passionnée par la montagne et qui a passé quelques jours de ses vacances sur le Fujiyama ! Elle, elle s'en fout ! Que la montagne soit en Chine, au Japon ou au Pérou, pourvu que montagne il y ait ! Et en ville, je vous dit pas, une traversée de la ville qui me donnerait des sueurs froides, elle l'envisage allègrement et sans ciller. Parfois, face à nos airs ahuris et quelque peu admiratifs (comme on admire un phénomène), elle se pose tout haut la question de l'aspect pathologique, voire obsessionnel de cette passion, mais rien n'y fait, tous les week-end, elle randonne.
Et moi qui ne peut même pas voir un film documentaire digne de ce nom ! Pour pouvoir lire des articles sur la vie culturelle à Pékin je me rabats sur les "Beijinger" et autres parutions pour expats.
Le film de Wang Xiao Shuai (qui a fait "Beijing bicycle") sur la Toscane que j'ai vu au centre culturel Italien était typiquement un film de commande pour amener des Chinois en Italie, dans cette région en particulier. Expédié en 3 semaine le film, où le cinéaste se raccroche à une superbe italienne photographe censée être son fil directeur (en fait on la suit partout et on la voit même quand ce n'est absolument pas nécessaire, très belle à part ça, on peut comprendre). On l'a balladé pour montrer une image de la Toscane digne d'attirer le touriste chinois (le film est passé sur CCTV, la grande chaîne chinoise).
Toutefois, le petit cocktail après le film valait le déplacement ! Ici beaucoup de choses ne sont pas chères pour nous, sauf le vin par exemple : il y en avait et du bon ! Les amuse-gueules italiens bien du terroir très bons aussi. Un plaisir !
J'ai aussi engagé la conversation avec le directeur de programmes de CCTV qui a programmé le film, un type d'une trentaine d'années : fin de non recevoir et rideau dès qu'il a été question de le contacter pour une éventuelle visite de studios ou intervention pour la semaine de la presse au Lycée Français ! Très correct, poli, renvoi de balle à l'envoyeur, élégant mais intraitable.
Pour en revenir au cinéma, il va y avoir un festival de court-métrages de jeunes réalisateurs que j'espère pouvoir suivre en partie. S'il y a lieu, je vous en parlerai.
J'ai participé à des ateliers Shakespeare, suivi deux "cours", mais la personne qui mène ces ateliers veut que nous nous engagions pour 4 représentations en décembre... un peu short. De plus, je me suis remise au chinois, seule en ce qui concerne l'écriture, avec mes cours de 2ème année, c'est assez prenant. Ce qui était sympatique c'est que nous étions très mêlés : anglophones, deux autres profs du lycée et passionnés de Shakespeare chinois, tous sympatiques. Les chinois, à l'anglais impeccable, jouent parfois Shakespeare dans leur langue, ce qui ravit tout le monde.
Par ailleurs, je me pose un tas de questions sur nous, les expats, aux salaires mirobolants pour les pékins du coins. Des questions aussi sur ce sur quoi tient cette tranquillité qui nous entoure. Ce qu'on représente aux yeux des chinois (quand ils s préoccupent de nous ou ont affaire à nous)... Mais on en reparlera peut-être de tout ça une autre fois.
La photo au dessus : un hutong quand la nuit est tombée (elle tombe vers 6h du soir)